ENTRETIEN AVEC JEROME, FONDATEUR DE L'AGENCE BASE CAMP TREK

ENTRETIEN AVEC JEROME, FONDATEUR DE L'AGENCE BASE CAMP TREK

- Quelle est la spécificité de base camp ?
Base camp est une agence que nous avons fondée avec ma partenaire népalaise Rashmi Tamot aux débuts des années 2000. Notre spécificité a été la formation de guides francophones capables d’encadrer des petits groupes au départ de Katmandou sur tous les sentiers de l’Himalaya. Ils viennent justement de terminer cette année une nouvelle formation de mise à niveau sur le mal aiguë des montagnes et les premiers secours, encadrés par des sauveteurs de montagnes alpins.

Étant moi-même tibétologue, Base Camp Trek s’est principalement développé sur les destinations de culture tibétaine, à savoir : le Ladakh, le Zanskar, le Mustang, le Dolpo, le Tibet et le Bhoutan.
Pour faire face à une demande grandissante d’individuels en recherche de compagnons de voyage, nous avons mis en place depuis quelques années des départs francophones en groupe accompagnés par des guides locaux et nous sommes sans doute la seule agence à offrir cette possibilité en Himalaya.

- Proposez-vous seulement du trek ?
Nous sommes bien sûr une agence leader dans l’organisation de trekking et d’expéditions, mais comme son nom ne l’indique pas, Base Camp Trek est aussi spécialisée sur les voyages de découvertes culturels.
Une journée de marche se termine rarement après 15h, partant de ce constat, nous avons eu l’idée d’utiliser ce temps libre pour organiser des rencontres, des conférences ou encore mettre en place des activités telles que la méditation, le taïchi ou le yoga.

Personnellement je me souviens des fois où, squattant le petit temple du village, d’observateurs nous devenions observés. Effectivement, ce sont les enfants du village qui agglutinés aux fenêtres venaient observer ces drôles de touristes, et non l’inverse ! Ainsi, nous avons créées des voyages de trekking et de méditation en pays Sherpa, dans les petits temples du Ladakh ou les monastères bhoutanais.

- Quelles sont les autres activités et voyages à thème que vous proposez ?
Ayant moi-même pratiqué la peinture à l’encre (sumi-e) d’origine chinoise et japonaise depuis plus de dix ans, et diplômé pour l’enseigner, j’organise et j’accompagne des voyages peinture, trekking et méditation. Ces voyages –comme les voyages axés sur le yoga- se déroulent sur des rythmes plus lents que les treks classiques afin de pouvoir prendre le temps de pratiquer une activité dans de bonnes conditions.

Cette lenteur est souvent le meilleur moyen de favoriser des rencontres, des échanges, et de mieux s’imprégner des lieux et des populations. (Selon le vieux concept du voyage immobile).
Ainsi, j’organise une à deux fois par ans, des voyages où j’enseigne les méthodes de peinture Tchan Je pars justement au printemps en Birmanie, à l’Everest en octobre, après être allé dans les Annapurnas, au Manaslu … Ces voyages à thème sont souvent organisés autour d’une personnalité spécialisée. Par exemple, nous collaborons avec Marie Milla, sono thérapeute et professeure de yoga qui organise chaque année des treks ouverts à tous pour une initiation à la marche en conscience, aux bains sonores …
Nous n’avons pas encore expérimenté le trekking et le chant chorale ou encore le trekking et la découverte de pratiques ancestrales comme le chamanisme, je n’ai rien dit mais il se pourrait qu’à l’automne prochain nous organisions un voyage en pays Chamane pour assister à un congrès chamanique !

Finalement , avec l’association Plastic Free Himalaya, nous réfléchissons aussi à des projets de Clean Walk en Himalaya, effectivement Base Camp Trek s’est toujours engagé pour la protection de l’environnement ; en en plus d’une sensibilisation sur place, nous voudrions passer à l’action pour faire passer un message fort sur la catastrophe écologique que représente le plastique en montagne.


Le voyage immobile
Temple de Kakani, région sherpa d’Hélambu : dans la belle lumière d’un matin, le vieux moine nous accueille entouré d’une nuée de gamins morveux et hilares qui espèrent glaner un stylo ou un biscuit au passage. Après avoir allumé les lampes à beurre et quelques bâtons d’encens pour réveiller le vieux Padma Shambhava qui sommeille dans la pénombre, le moine referme la lourde porte en nous gratifiant d’un sourire complice et nous laisse à notre méditation matinale. Les gamins se précipitent aux fenêtres et, le nez collé à la vitre, gloussent de plaisir en observant ces drôles de méditants venus squatter le temple du village. Mais bientôt ils se lassent et retournent à leurs jeux sans plus se préoccuper de nous : nous sommes entrés dans le paysage, nous avons traversé le miroir.

Notre équipe de Sherpas a replié les tentes et nous reprenons notre marche sur le sentier qui serpente entre les champs d’orge tandis que les sommets enneigés sortent un à un de l’ombre, loin là-bas vers le Nord…

Les vrais lieux se découvrent à la faveur des pas, au détour du chemin. Ils apparaissent, se donnent à voir mais non d’emblée, ni en pleine évidence ; le haut lieu, comme les petits princes, s’apprivoise dans la lenteur. C’est lorsqu’on se pose un instant que l’on perçoit les mouvements du monde, c’est dans le silence qu’on entend la musique du monde. Pour moi le vrai voyage se passe dans le silence et l’immobilité, concept que je partage avec mon vieux complice Matthieu Ricard qui l’a parfaitement illustré dans son livre de photos prises de son ermitage : ‘’Le Voyage Immobile’’*

En ce sens, je n’ai jamais été un vrai trekkeur, car lorsque je me balade en Himalaya ou ailleurs, j’ai toujours envie de m’arrêter en chemin pour m’imprégner des lieux et des gens. Lors de mon premier trek dans les Annapurnas en 1976, j’ai posé mon sac dans le camp de réfugiés de Hyangja qui, à l’époque se trouvait à 3 heures de marche du lac de Pokhara et j’y suis resté 3 semaines pour apprendre le tibétain. A l’ombre du Macchapuchare, en regardant les longues caravanes de mules festonnées qui partaient approvisionner les hauts villages himalayens et, incidemment, alimenter la guérilla tibétaine qui luttait contre l’occupation chinoise au Mustang. ?Quant au Népal, de passage, j’y vis finalement depuis 25 ans - je suppose qu’on doit pouvoir faire plus court…

Base Camp Trekking
Octobre 2019